Rencontre avec Florence Leduc, présidente de l’Association Française des Aidants
Vous présidez l'Association Française des Aidants. Pourriez-vous nous présenter en quelques mots l'activité de cette association ?
Le travail de l’Association Française des Aidants s’articule autour de 3 volets :
- le volet politique vise à faire prendre conscience à la société française et à ses dirigeants qu’aujourd’hui le pays compte plus de 8 millions d’aidants. L’allongement de la durée de vie des personnes âgées, adultes handicapés et enfants malades nous propulse dans une configuration nouvelle. Il est nécessaire de ne pas faire d’amalgame… Les aidants ne sont pas des intervenants professionnels. D’où l’importance de mettre en place des solutions pour que les personnes dépendantes aient accès aux compétences de professionnels et que les aidants puissent continuer à vivre une vie normale, au-delà de l’accompagnement quotidien dont ils font preuve.
- le volet soutien voit la mise en place d’un réseau de Cafés des Aidants sur l’ensemble du territoire national, en lien avec les acteurs locaux, les hôpitaux, les associations de libéraux,... À ce jour, 83 cafés permettent aux aidants de rencontrer des équipes de l’Association Française des Aidants, des psychologues et d’autres aidants de leur secteur, pour s’informer, échanger et partager librement leur quotidien. En collaboration avec la Mutualité Française, l’association propose également un programme santé à destination des aidants. Des ateliers visent à sensibiliser les aidants aux altérations de la santé dont ils peuvent être victimes en complétant leur rôle. Au-delà de la prévention, des plans de récupération et d’entretien de la santé sont définis avec les aidants participants.
- le volet formation offre aux aidants qui le souhaitent la possibilité de suivre une formation centrée sur les bons gestes à adopter au quotidien, comme savoir relever la personne, repérer les situations d’urgence et agir en conséquence,… Le but n’est pas de transformer les aidants en intervenants professionnels ; mais de se questionner sur leur rôle et ses limites, tout en leur fournissant des conseils pratiques. Des formations sont également proposées aux intervenants professionnels pour les aider à se situer et trouver leur juste place dans la relation triangulaire qu’ils vivent avec la personne dépendante et son aidant.
© Healthline
Qui sont les aidants aujourd'hui en France ? Quelles sont les difficultés auxquelles ils sont confrontés ?
Les aidants sont de tous milieux et de tous âges. Ils peuvent être des enfants aidant un parent, des frères et des sœurs aidant un membre de la fratrie, des pères et des mères aidant un enfant, des époux et des épouses aidant un conjoint. Si des inégalités se dessinent en matière de situation financière et d’accès à une aide extérieure (aide de nuit, etc.), les aidants viennent de tous horizons. C’est pour cette raison que les Cafés des Aidants ne se concentrent pas sur une seule cible, mais mélangent les populations. Trop d’information tue l’information. Aujourd’hui avec internet, le volume d’information accessible en un clic est immense. La première difficulté à laquelle sont confrontés les aidants est donc de savoir où chercher l’information et de trouver la bonne information. Ensuite, leur parcours du combattant, comme ils l'appellent, commence... pour trouver les bons intervenants professionnels, des lieux de soutien et un juste équilibre entre leur volonté d’aider, leur vie personnelle et leur santé. Tous les aidants n’ont pas besoin d’aide ou de la même aide, car aucun n’est dans la même situation. C’est pourquoi l’Association Française des Aidants a développé un outil pour les situer et actionner la bonne réponse à leur besoin, sans être opportun avec eux.
Quel est le lien qui unit un aidant et une personne dépendante ? Comment bien vivre cette relation au quotidien ?
La question du lien est complexe, car la dépendance induit une modification du lien préétabli de fait par la filiation ou la relation initiale entre l’aidant et l’aidé. Ce changement de posture et cette transformation de la relation à l’autre peuvent être violents pour chacune des parties. Il faut donc faire en sorte que les gens vivent une relation saine entre eux, quand l’aide est consentie. La situation peut être difficile, voire douloureuse ; pourtant, si l’on s’y met tous ensemble, elle peut devenir plus légère et plus simple.
Comment faites-vous vivre le réseau des aidants ?
Nous mettons en place des opérations de partenariat à travers des programmes concrets, tel que le programme de formation des aidants. Nous partageons notre expertise par le biais de nombreux articles, colloques scientifiques et groupes de travail. De cette façon, l’association se fait connaître et est régulièrement consultée pour son expertise. Les demandes de partenariats nous parviennent sans nécessité de démarchage de notre côté. D’ici 2 ans, nous visons un autofinancement à hauteur de 70%, basé sur ces opérations et notre propre expertise.
Quels conseils pratiques donneriez-vous à un aidant "débutant" ?
Chercher la personne à qui tendre la main pour le guider vers l’information, la santé, l’équilibre. Il est important de bien réfléchir aux conséquences qu’implique le fait de devenir aidant et d’évaluer comment y faire face tout en continuant de vivre normalement. Il est difficile de prendre de la distance et d’accepter que nous ne soyons pas tous puissants. Mais c’est nécessaire, il faut préserver sa propre vie. S’ils en ressentent le besoin, l’Association Française des Aidants est à leur disposition pour les aider à réfléchir, les orienter et les guider pour se poser les bonnes questions et trouver les bonnes solutions.
Merci à Florence Leduc d’avoir pris le temps de répondre à nos questions. Pour adhérer à l’Association Française des Aidants, rendez-vous sur le site de l’association.